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Interdire les travailleurs de remplacement est une question purement politique

Interdire les travailleurs de remplacement est une question purement politique

En l’absence de travailleurs de remplacement lors d’une grève, qui assurera le fonctionnement des trains, des avions et des ports?

Par : Robin Guy, vice-président et chef adjoint des relations gouvernementales
Cet article est paru à l’origine dans le
Financial Post.

Au cours des derniers mois, plusieurs grèves successives sont venues perturber l’économie canadienne. De la grève des ports de la côte ouest cet été à celle de la Voie maritime du Saint-Laurent cet automne, le Canada est en train de se forger une réputation de partenaire commercial imprévisible. Pour mettre les choses en perspective, un récent rapport de la Banque Scotia indique que le Canada a perdu plus d’heures de travail en raison des grèves qu’il n’en a perdu à tout moment pendant les restrictions imposées par la pandémie. Tout indique que d’autres conflits de travail sont à venir.

Tout en prétendant s’attaquer aux problèmes de productivité du Canada, les politiciens proposent une législation anti-travailleurs de remplacement qui réduira la productivité, ternira encore plus notre réputation mondiale et empêchera le Canada de simplement faire avancer les choses.

Le gouvernement est conscient des risques. En fait, son propre document de travail sur la législation anti-travailleurs de remplacement indique que la majorité des études sur l’interdiction des travailleurs de remplacement ont montré qu’elle s’accompagnait d’une augmentation de la fréquence des grèves et des lock-out. Si ces recherches sont exactes, l’interdiction pourrait nuire à l’économie en soumettant les infrastructures de télécommunications et de transport du Canada, soumises à la réglementation fédérale, notamment les trains, les avions, les camions et les navires qui constituent le nerf de notre chaîne d’approvisionnement, à des conflits de travail fréquents et de longue durée.

Les travailleurs de remplacement permettent aux entreprises des secteurs ferroviaire, portuaire, aérien et des télécommunications de maintenir un niveau de continuité de base qui préserve les services essentiels pour les Canadiens. Ces travailleurs, généralement des employés non syndiqués d’une organisation confrontée à un arrêt de travail ou des entrepreneurs ayant une relation à long terme avec l’organisation, constituent un filet de sécurité essentiel pour notre économie, capable d’intervenir temporairement, dans l’intérêt des Canadiens, jusqu’à ce que l’arrêt de travail prenne fin.

Interdire à ces travailleurs de maintenir un niveau d’activité suffisant peut avoir de graves conséquences pour tous les Canadiens.

Les pannes de notre infrastructure de télécommunications, qui doit être rapide et fiable, sont souvent résolues sans problème. Or, en cas de grève, les travailleurs de remplacement ne seraient pas en mesure de résoudre ces problèmes. Les clients d’une zone affectée pourraient même être privés de services d’urgence, comme l’accès au 911, que ce soit pour les ambulances, les pompiers ou la police. Les cafés et restaurants locaux ne pourraient plus traiter les paiements, et les Canadiens ne pourraient plus joindre leurs proches.

Il faut également tenir compte du fait que des Canadiens de partout au pays comptent sur les transports en commun pour se déplacer, y compris sur les services ferroviaires pour se rendre au travail et en revenir tous les jours. Environ 70 millions de passagers utilisent le rail chaque année, y compris le long de nos plus grands corridors dans les régions du Grand Toronto, de Montréal et de Vancouver. En cas de grève, les travailleurs de remplacement ne pourraient pas maintenir les trains à l’heure prévue. Des dizaines de milliers de Canadiens seraient contraints de trouver d’autres moyens pour se rendre à leur destination.

Le transport aérien serait également très affecté, en particulier dans les nombreuses communautés qui ne sont accessibles que par avion. Si les bagagistes ou les personnes chargées de faire le plein d’essence des avions se mettaient en grève, les travailleurs de remplacement ne pourraient pas assurer la continuité des déplacements des Canadiens. Les Canadiens qui partent en vacances devraient annuler leur voyage. Les travailleurs ne pourraient pas rentrer chez eux. Les Canadiens vivant dans des communautés accessibles par avion seraient coupés du monde.

Bref, aucun besoin ou avantage lié à l’interdiction du recours temporaire à des travailleurs de remplacement ne peut justifier la perte de services essentiels, compte tenu des risques encourus. Sans compter que de nombreuses études, datant de plusieurs décennies et menées dans de multiples régions, ont démontré que l’interdiction des travailleurs de remplacement décourage l’investissement et entraîne une baisse des salaires, une diminution des possibilités d’emploi et des grèves plus fréquentes et plus longues, avec tous les préjudices économiques que cela implique.

Le système canadien de négociation collective, bien établi depuis de nombreuses années, a été soigneusement conçu pour encourager les employeurs et les syndicats à parvenir à des accords à la table des négociations. Cette nouvelle législation ferait pencher la balance du pouvoir en faveur des syndicats et porterait gravement atteinte à l’économie canadienne. Notre réputation, déjà chancelante, en tant qu’endroit fiable pour faire des affaires serait encore plus fragilisée, et le gouvernement porterait atteinte à la capacité des Canadiens à recevoir les services dont ils ont besoin.

Les parlementaires sont conscients des dangers liés à l’interdiction des travailleurs de remplacement. Pourtant, plutôt que de faire ce qui est dans le meilleur intérêt du pays, ils continuent à faire de la politique. Les Canadiens paieront la note.

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