Les préoccupations en matière de concurrence ne surviennent que dans des circonstances limitées

Bureau de la concurrence Canada
50, rue Victoria
Gatineau (Québec)  K1A 0C9

Soumis via le formulaire en ligne à l’adresse : https://bureau-concurrence.canada.ca/fr/formulaire-retroaction-tarification-algorithmique-concurrence-document-travail

Objet : Commentaires sur le document de discussion – Tarification algorithmique et concurrence

La Chambre de commerce du Canada représente plus de 200 000 entreprises de toutes tailles de l’ensemble du pays. Nous sommes donc conscients qu’une application rigoureuse des lois sur la concurrence est essentielle à une économie forte. La concurrence encourage l’innovation et profite aux consommateurs sous la forme de prix plus bas, d’un choix plus vaste et de produits et services de meilleure qualité.

Nous reconnaissons que l’avènement et l’utilisation de plus en plus courante des algorithmes de tarification dynamique peuvent justifier une analyse de leurs effets économiques et de la façon dont ces outils interagissent avec nos lois sur la concurrence. Une telle analyse peut également contribuer à renforcer la confiance du public envers cette technologie.

Nous sommes d’avis que les algorithmes de tarification sont généralement favorables à la concurrence et bénéfiques sur le plan économique. Les effets négatifs potentiels sur la concurrence ne se manifestent que dans un nombre restreint de cas. Toute mesure d’application des lois sur la concurrence visant à répondre aux préoccupations liées aux algorithmes de tarification devrait donc adopter une approche prudente qui ne freine pas les comportements favorables à la concurrence, l’innovation et les avantages pour les consommateurs.

Nous soumettons les commentaires suivants à l’attention du Bureau de la concurrence en réponse au document de discussion portant sur les algorithmes de tarification et la concurrence.

Les algorithmes de tarification sont favorables à la concurrence

Les algorithmes de tarification dynamique permettent aux entreprises d’optimiser leurs prix en fonction des conditions du marché, comme la demande, les prix des concurrents ou les niveaux des stocks. Les algorithmes de tarification peuvent être basés sur des règles ou avoir la capacité de s’enrichir au fil du temps afin d’atteindre un objectif spécifique, comme l’équilibre entre l’offre et la demande ou la maximisation de la fidélisation de la clientèle. Les algorithmes de tarification personnalisés peuvent également intégrer un éventail plus large de données afin d’offrir des remises ciblées aux consommateurs.

Des études ont montré que les algorithmes de tarification dynamiques et personnalisés peuvent accroître l’efficacité statique et le bien-être social[1]. La tarification personnalisée permet aux entreprises d’offrir des remises personnalisées à chaque consommateur, ce qui attire de nouveaux clients et augmente la couverture du marché, permettant ainsi aux entreprises d’augmenter leur production au-delà de ce qu’elles produiraient sous un régime de tarification uniforme. Cette augmentation de la production peut à son tour faire baisser le niveau général des prix, au bénéfice de tous les consommateurs.

Si l’utilisation d’algorithmes de tarification a suscité des inquiétudes quant à une éventuelle coordination tacite des prix, la nature même de la tarification personnalisée constitue un puissant frein à une telle coordination : lorsque les entreprises peuvent accorder des remises à chaque consommateur individuellement, dans un marché concurrentiel, elles ont tout intérêt à augmenter leur production plutôt qu’à la restreindre. De même, la tarification individualisée peut accroître la valeur de l’innovation en permettant à de nouveaux produits d’atteindre un plus grand nombre de clients[2]. Ces deux effets sont favorables à la concurrence.

De surcroît, comme les algorithmes de tarification peuvent surveiller les prix des concurrents afin d’offrir le meilleur rapport qualité-prix, ils peuvent intensifier la concurrence basée sur le prix sur les marchés concurrentiels, ce qui profite également aux consommateurs. À mesure qu’ils se généralisent, les algorithmes de tarification peuvent également doter les petites entreprises et les nouveaux entrants d’outils jusqu’alors inaccessibles pour concurrencer agressivement les opérateurs existants.

Enfin, en automatisant les tâches fastidieuses liées au processus de tarification (p. ex., la surveillance, l’analyse), les algorithmes de tarification peuvent améliorer la productivité et réduire les coûts de production. Les dépenses marketing liées à des promotions qui ne sont pas pertinentes pour les consommateurs peuvent également être réduites. Ces économies sont souvent répercutées directement aux consommateurs sous forme d’offres supplémentaires ou de prix plus bas.

Les préoccupations en matière de concurrence sont limitées à un ensemble restreint de situations

La principale préoccupation des autorités en matière de concurrence face à l’avènement des algorithmes de tarification tient au fait que leur utilisation puisse conduire à une collusion tacite sur les prix. Si cette préoccupation hypothétique est compréhensible, le risque d’une telle collusion est généralement très faible, notamment en présence d’une concurrence solide.

Il importe d’insister sur le fait que la collusion tacite est distincte de la fixation parallèle des prix, une forme de garantie du meilleur prix couramment observée dans le secteur de la vente au détail. Cette pratique courante ne constitue pas une violation des lois sur la concurrence et peut être favorable à la concurrence lorsque les entreprises surveillent activement les prix et les baissent. La Loi sur la concurrence fournit déjà au Bureau de la concurrence les outils nécessaires pour lutter efficacement contre la collusion, lorsque des entreprises s’entendent explicitement pour fixer les prix afin d’abuser de leur position dominante ou d’exclure des concurrents.

Les préoccupations relatives à la tarification algorithmique font actuellement l’objet d’un examen dans un petit nombre d’affaires antitrust aux États-Unis, dans l’Union européenne et au Canada, où il est allégué que l’utilisation de la tarification algorithmique enfreint le droit de la concurrence sur des marchés tels que ceux de l’essence, de la vente au détail, de l’immobilier et de l’hôtellerie. Ces affaires, qui s’intéressent à la transparence et à la nature des algorithmes de tarification, n’ont pas encore abouti à des conclusions quant à leur incidence économique et seront examinées au cas par cas. Nous recommandons donc que le Bureau de la concurrence adopte une approche prudente en matière d’application des règles de concurrence relatives aux algorithmes de tarification.

En général, les algorithmes de tarification sont bénéfiques sur le plan économique, car ils intensifient la concurrence, encouragent l’innovation et augmentent la disponibilité des biens et des services. Si des problèmes de concurrence peuvent se poser dans certaines circonstances, ces cas sont relativement limités et peuvent être pris en charge par les lois et les cadres analytiques existants. Nous saluons néanmoins le Bureau de la concurrence d’avoir entrepris cette étude afin de veiller à ce que l’application des règles de concurrence suive l’évolution des technologies.

Cordialement,
Liam MacDonald
Directeur, Politiques et relations gouvernementales
Chambre de commerce du Canada
lmacdonald@chamber.ca

[1] Personalised Pricing in the Digital Era, OCDE, 2018. https://www.oecd.org/en/publications/personalised-pricing-in-the-digital-era_db4d9c9c-en.html (en anglais)

[2] Ibidem.